FRIESENHEIM
2 décembre 1944
14 décembre 1944: sur la route de Witternheim à Binderheim, un Sherman appuyant un groupe de fantassins
(Collection Colonel Dehen Photo S.C.A.)
Après la prise de Strasbourg, la bataille d’Alsace commence.
Dès le 25/11, LECLERC pousse des éléments de reconnaissance vers ERSTEIN.
Le long du Rhin, il glisse le GTD qui réussit à atteindre, le 01/12, au prix de durs combats, FRIESENHEIM à 40km au Sud de STRASBOURG.
C’est le début d’une longue campagne d’hiver ralentie par le froid et la neige : la liquidation de la poche de Colmar prendra deux mois et demi.
La 1ère phase, du 1er au 30 décembre, est une participation à la bataille d’Alsace par une pression continue exercée sur le flanc nord de la poche dans les régions de FRIESENHEIM-WITTERNHEIM-EBERMUNSTER-SELESTAT, aux ordres de la 1ère armée française.
Le temps est épouvantable, avec pluie, neige, bourrasque, froid intense, sol inondé, glacé, blanc de neige épaisse de plusieurs centimètres. La vie pour la troupe est dure et difficile.
Constamment, Leclerc est sur le terrain et voit « ses » soldats, se rend auprès des unités aux combats dans les postes les plus avancés.
(Texte issu du site Internet de l’Amicale du R.M.T.)
https://amicale-rmt.fr/
J.M.O du 12ème CUIRS
Vers minuit, le détachement LENOIR formant point d’appui aux lisières Sud du village, subit une contre-attaque d’infanterie allemande montée sur Half-tracks, venant de Friesenheim.
Violente réaction des chars, des TD et des armes automatiques de la section LEVIANDIER.
Néant
Pertes ennemies :
3 HT incendiés
Nombreux morts et blessés.
L’ennemi très éprouvé se replie vers 01h00.
Plan d’attaque :
Détachement PERCEVAL (section LEHOT, 1 groupe du Génie) et détachement LENOIR en accompagnement immédiat, route de Boofzheim -Friesenheim.
Détachement MARSON (sections MARSON et BRIAULT, 1 groupe du Génie), à pied le long du Grenzgraben.
Départ de l’attaque : 08h00
Les deux détachements se heurtent à 500 mètres Sud de Boofzheim, à des barrages de mines. La progression ne peut reprendre que vers 10h00, après déminage par le Génie.
A 10h30, l’avance est de nouveau stoppée par les feux de chars et de canons d’assaut embossés dans les boqueteaux de Hobzplatzchen et Maydlach. L’infanterie ne progresse que de 400 mètres en 3 heures. Un canon d’assaut allemand est cependant détruit par un TD vers 11h00.
Le colonel ROUVILLOIS blessé à la jambe droite par un éclat de mine, reprend le commandement de l’action au bout d’une heure.
A 13h00, le détachement LENOIR reprend la progression et pénètre dans le village. Le détachement PERCEVAL nettoie les lisières Nord. Le détachement MARSON atteint les lisières Est.
– Détachement LENOIR, aux lisières Sud, face à Diebolsheim,
– Détachement BRIOT aux lisières Sud-est,
– Détachement PERCEVAL et COMPAGNON aux lisières Nord et Nord-est,
– PC, sortie Nord du village, route de Boofzheim.
Pertes amies :
5 tués (4 du RMT, 1 du Génie)
36 blessés (1 du 12 e Cuir, 28 du RMT, 7 du Génie, 1 du service de santé)
1 TD légèrement touché
Pertes ennemies :
2 canons d’assaut,
2 canons de 88mm,
1 obusier de 150mm, 1 obusier de 75mm
1 mortier de 50mm
Nombreux morts et blessés
128 prisonniers dont 1 officier.
Toute la nuit, violente réaction d’artillerie ennemie sur Friesenheim.
Le sous-groupement ayant eu, au cours des trois derniers jours 12 tués et 57 blessés, la progression vers Diebolsheim est ajournée.
Violents tirs d’artillerie et de mortiers ennemis sur Friesenheim.
4 décembre 1944.
Entre 06h00 et 07h00, violents tirs ennemis sur le village.
Dans la matinée, le sous-groupement ROUVILLOIS est relevé de Friesenheim par le sous-groupement
DIDELOT et vient au repos à Boofzheim où il adopte le dispositif suivant :
– Route de Friesenheim Détachement BRIOT
– Route de Rhinau détachement COMPAGNON
– Partie Nord-est du village Détachement PERCEVAL
– Sortie Nord PC et service de santé
– Route de Herbsheim Détachements LENOIR et JOSSE.
Le colonel ROUVILLOIS étant obligé de séjourner quelques temps à Strasbourg pour y soigner sa blessure, le commandant FOSSE prend le commandement du sous-groupement.
Le village de Rhinau est occupé par le détachement KREBS qui passe aux ordres du sous-groupement FOSSE.
Rien à signaler
Quelques tirs ennemis.
Rien à signaler
Tirs assez violents d’artillerie ennemie
Pertes amies :
1 cuirassier tué.
Rien à signaler.
Rien à signaler.
Le Régiment, du moins pour la partie qui compose le sous-groupement ROUVILLOIS, cantonne à Boofzheim. Le village reste soumis aux tirs de l’artillerie allemande, qu’ils viennent du Sud ou de l’Est.
Cette période se passe en patrouilles nombreuses. Le sous-groupement DIDELOT, avec le 4 e escadron, tient Friesenheim. Des éléments du Régiment sont à Rhinau, tandis que certains autres sont à Obenheim avec l’EM du GTD.
Tous ces endroits sont vulnérables ; les obus ne cessent de dégringoler sur les villages qui s’effondrent peu à peu.
Le lieutenant-colonel ROUVILLOIS est en traitement à Strasbourg. Sa jambe blessée par une mine exige du repos. Le chef de bataillon FOSSE a pris le commandement de son sous-groupement.
Le sous-lieutenant BELLAN est affecté au régiment et passe au 2 e escadron. Un tour de permission est créé : on va se détendre pour 24 ou 48 heures à Strasbourg où se trouve le PC principal du Régiment, aux ordres du lieutenant LEROY-THEBAUT, dont le PC est à l’hôtel de Paris.
Des ordres arrivent en vue d’une opération sur Diebolsheim. Le sous-groupement FOSSE doit partir de Friesenheim. Il dispose d’un bataillon de parachutistes de la 1 e Armée Française.
Ce bataillon s’avère excellent ; il se tire à merveille des missions de patrouilles qui lui sont confiées. Une opération est prévue sur Diebolsheim à travers les champs de mines allemands.
Les escadrons de chars non engagés serviront d’appoint d’artillerie. Les chefs de char étudient les procédés de tir indirect, d’emploi des niveaux des travaux et de mise en direction.
Derniers préparatifs pour une attaque sur Diebolsheim.
L’opération prévue sur Diebolsheim est annulée. Le bataillon de parachutistes ayant été retiré du groupement tactique.
Hiver alsacien avec les fusiliers-marins
Hiver alsacien avec les fusiliers-marins
(Témoignage)
=== BOBESHEIN – OBENHEIM – FRIESENHEIM ===
Texte issu de www.rbfm.com/georgesrack.html
Les Lieutenants LACOIN et CASSIN, ce dernier venant d’arriver, proposent d’y aller, ce qui est accepté par le capitaine BONNET ; mais celui-ci qui est très prudent désigne ma jeep mitrailleuse ‘’L’INTREPIDE’’ pour les seconder. Nous passons dont en deuxième position derrière l’autre jeep radio.
C’était le 2 Décembre 1944. Nous rentrons donc dans le village d’OBENHEIM, et nous tournons vers la droite en direction de la forêt où doit se trouver ledit pont. A environ 20 mètres avant d’arriver au pont nous nous arrêtons et le capitaine GODET nous conseille de faire faire demi-tour aux jeeps, prêts à repartir. Comme auprès du pont se trouve quelques maisons et que rien ne laisse présager la présence des habitants le Capitaine nous conseille de fouiller les alentours. Dès que nous étions arrivés, j’avais remarqué un petit blockhauss sur la gauche, et j’avais cru voir passer une ombre dedans. Je l’avais signalé au lieutenant LACOIN qui m’avait répondu : ‘’Bah ! ce n’est rien. C’est sûrement un villageois’’.
Mais ce dernier voulait se rendre compte par lui-même et alors que nous revenions, BLANCO – MERIC et moi, de contourner les maisons sans rien trouver ; il signalait à son tour qu’il venait de voir passer dans le blockhauss un individu. Mais comme à ce moment plusieurs obus de mortier nous tombent de tous côtés et que nous n’avions plus rien à faire, le Capitaine nous dit de rejoindre les jeeps. Alors que nous allions attendre le talus pour monter sur la route un peu surélevée, une fusillade des plus nourries ! ta – ta – ta – ta – ta – ta – ta – ta – ta – ta – ta – nous passe au-dessus de la tête venant du blockhauss situé à environ une vingtaine de mètres de nous.
Aussitôt chacun s’accroupit et rampe près du talus pour se protéger un peu, puis nous occupons des trous faits par les boches le long de la route mais le lieutenant LACOIN est blessé au poumon, il arrive néanmoins, lui aussi, dans un trou.
Que pouvons-nous faire maintenant ? nous ne pouvons même pas nous défendre, car en s’accroupissant par terre nos armes ont été bouchées par la terre et la boue et nous ne pouvons plus nous en servir. Le Capitaine annonce donc qu’il faut que l’un d’entre nous essaye de monter dans une jeep pour aller chercher du renfort. Je crois bon de lui faire remarquer que c’est de la folie, car le premier qui monte sur la route sera aussitôt une passoire. La seule solution pour aller chercher du renfort est de ramper le long du talus, c’est ce que je fais aussitôt.
C’est alors que levant la tête un peu, nous voyons nos jeeps en feu, car les boches viennent de les allumer avec leurs balles incendiaires. Je pars donc en rampant et me reposant de trou en trou, c’est là que je suis un peu à l’abri des balles qui me sifflent aux oreilles sans arrêt et des mortiers qui éclatent de tous côtés et toujours de plus en plus nombreux ; évidemment les boches voudraient bien en finir avec nous, mais il faut croire que ce ne sera pas encore pour cette fois.
A chaque trou donc je souffle un peu, je bois une gorgée d’eau de mon bidon individuel, je constate si je ne suis pas blessé et je me demande si je pourrai arriver jusqu’au bout, car je crois même que l’un des boches est passé de notre côté de la route et qu’il m’ajuste comme un lapin qui n’est pas encore à point. C’est alors que dans un certain trou, je vois BLANCO qui me rejoint et qui me dit, qu’il n’en peut plus. Je repars donc, mais quel bonheur, car à ce moment j’entends des chars sur la route, je lève la tête au dessus du talus et en effet je vois deux Shermans arriver vers nous, je me lève aussitôt et je leur fais signe d’activer, arrivés à ma hauteur, je leur conseille de se rendre auprès du Capitaine où ils recevront des ordres en conséquence. Une ambulance suivant les deux chars et BLANCO y prit place pour aider à conduire le Lieutenant LACOIN, MERIC et moi nous retournions vers le Capitaine BONNET pour le renseigner. En chemin comme nous avions infiniment soif, nous buvons plusieurs coups de vin chez un cultivateur d’OBENHEIM. Et après avoir rendu compte au Capitaine BONNET, je retourne avec lui et l’auto-mitrailleuse du P.H.R. sur les lieux du guet-apens. Là, les deux chermans sont toujours en position, car après avoir tiré plusieurs obus dans le blockhauss, les Allemands ont disparu dans le bois. Des deux jeeps, seulement ‘’l’Intrépide’’ peut être récupérée et réparée au dépannage car le moteur est en bon état. Le Capitaine ne me laisse pas retourner chercher ma carabine car il ne tient pas, dit-il, à ce que je sois une nouvelle victime.
‘’Une carabine, me dit-il, on t’en donnera un autre’’.
Puis, nous revenons sur la route, car nous n’avons plus rien à faire en ce coin maudit. Nous reprenons la route dans la colonne que se remet en marche vers Friesenheim pour remplacer ceux qui viennent d’attaquer et qui ont eu des pertes. Trois Panthères (Char Panther allemand) et un obusier allemand sont détruits par nos chars au cours de ces attaques. MERIC nous a quitté pour aller à l’état-major du régiment avec un peu de chagrin, au fond. Puis, nous rentrons dans Friesenheim. Tous les habitants qui restent au village sont invisibles car ils sont terrés, apeurés dans leurs caves C’est alors que pour nous commence la vie à Friesenheim, un enfer pour nous ce village, dès les premiers jours, les habitants ont été évacués vers l’arrière. Et celui chez qui nous avons pris logis, nous recommande avant de partir de bien nous servir, de manger des lapins et la volaille, de boire le vin et le schnapps, mais de soigner un peu ses deux vaches qui restent, car si les boches revenaient, ils lui prendraient toutes ses bêtes, il vaut donc mieux que ce soit nous qui les mangions. La vie journalière pour nous fut bien monotone ; le quart, les repas, et la cave bien souvent , car les obus allemands ne cessent de tomber à tous moments de la journée, alors que les nôtres ne répondent pas ou très peu. Nous avons parfois même la visite d’avions de reconnaissance ennemis. Nous étions sans cesse sur le qui-vive de jour et de nuit où nous assurions deux postes par char, un dans le char, l’autre à la mitrailleuse, car les Boches se trouvent à 1 km 2 à l’Ouest, 2 kms à l’Est et 1 km au sud. Nous étions à peu près 130 au village, mais chaque jour de moins en moins, car on évacuait toujours des morts et des blessés. Ceci dura quinze jours, heureusement que nous avions du vin et du schnapps à boire ; car je crois que nous serions devenus tous fous.
Et un beau jour, ce fut la relève. Nous ne laissions que des ruines à nos camarades. Nous revenions à BOBESHEIN pour écouler là nos émotions et pour nous changer un peu, car nous venions de toucher nos vêtements qui étaient conservés par les voitures du train régimentaire ; heureusement qui nous n’avions pas tout dans la jeep, car il ne me resterait plus rien à me mettre … Puis, le jour de Noël se passa chez de braves gens où nous habitions, en chantant toute la nuit accompagnés par un gars du Tchad qui jouait de l’accordéon, un brave petit gars que nous avions pris, au passage en Lorraine ; il était de ST CLEMENT.
Puis, nous sommes retournés à FRIESENHEIN mais que pour deux jours, le secteur était devenu plus calme.
Crédit photo : Commune de Friesenheim